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Écrire un pitch de roman

Par Siana, le 13/05/2022

Je sais que beaucoup d’auteurs s’arrachent les cheveux quand ils se prêtent à l’exercice, et j’ai déjà lu pas mal de ressources intéressantes à ce sujet, alors j’ai décidé de tout synthétiser dans un article.

Ici, on va parler du pitch que l’on écrit pour convaincre les éditeurs, celui qui est censé les accrocher en quelques lignes savamment choisies. (Le résumé de 4ème de couverture se construit différemment. On le verra peut-être une prochaine fois.)

Sauf que… écrire un pitch de roman est difficile, c’est un peu comme si on vous demandait de résumer un gros pavé de 800 000 caractères en moins de dix lignes. Donc premier challenge : quels éléments garder, et quels sont ceux à écarter ? Ensuite, comment formuler tout ça pour que ça ait l’air intéressant ? Et bonus : comment montrer que votre histoire est différente des autres ?

C’est parti pour la construction du pitch !

Dans le pitch : quels éléments choisir ?

Puisqu’on ne peut pas tout y mettre, il va d’abord falloir sélectionner les informations les plus intéressantes. Si on peut se douter qu’un personnage d’intrigue secondaire qui n’apparaît que deux fois n’y aura pas sa place, c’est souvent plus délicat quand on a plusieurs personnages principaux ou des fils qui se croisent régulièrement.
Pour commencer, je vous propose donc d’effectuer un rapide “état des lieux” de votre roman. Prenez de quoi noter et répondez aux questions suivantes. Elles vous permettront d’identifier facilement les bases de votre histoire.

Qui est le personnage principal ?
– son nom
– ses 2 ou 3 fonctions principales (métier, condition ou particularité) : chevalier, cuisinier, orphelin, héritier, anorexique, prêtre, rebelle…
– son trait de caractère principal : naïf, malpoli, dévoué, possessif, courageux, impulsif…

Si c’est un groupe de personnages :
– pour un groupe de 2 ou 3 personnages, on peut reprendre la liste ci-dessus pour chacun d’entre eux
– pour un groupe de plus de 3 personnages, on va chercher ce qui les relie et mentionner le groupe en tant que tel : lycéens, jeunes, aventuriers, rebelles, bandits, chevaliers, famille, amis, équipage de vaisseau…

Ensuite, on distingue les autres éléments de l’histoire :

– Quel est le contexte, l’univers, le cadre (on parle aussi d’arène) ?
Ex. : un lycée réputé, un centre militaire, une ville futuriste, un royaume féérique, un manoir hanté, une planète forestière…

– Quel est l’objectif principal des personnages (souvent un problème à résoudre) ?
Ex. : aller récupérer ou détruire un objet, vaincre un sorcier, faire tomber un roi, survivre, sauver quelqu’un, nouer une relation importante…

– Quelles sont les menaces les plus importantes qui apparaissent (trois maximum) ?
Ex. : un rival ou un groupe ennemi, une catastrophe naturelle, un monde hostile, des monstres, soi-même, une figure d’autorité, la pression sociale, une croyance répandue

– Quel est l’objectif de l’ennemi (si c’est un personnage) ?
Note : il sera souvent similaire ou opposé à celui des personnages principaux.

– Quels sont les enjeux (le risque si la menace gagne) ?
Ex. : être tué, pourchassé, contaminé, torturé, perdre sa liberté, voir ses amis ou sa famille mourir, la fin du monde…

– Quel est l’incident déclencheur de l’histoire ?
Note : c’est l’événement du début qui lance l’enchaînement des actions ; sans lui, le personnage en serait resté à sa petite vie

Et voilà, avec tout ça vous avez la base de votre pitch ! Vous pourrez éventuellement ajouter un ou deux détails qui vous tiennent à cœur, mais normalement vous n’aurez pas besoin de plus d’éléments.

Ou peut-être juste un, mais c’est davantage une idée…

Le concept, ou l’essence de l’histoire

Si votre roman est centré sur un “concept” particulier, ça n’en rendra le pitch que plus intéressant. C’est en quelque sorte la grande idée qui porte toute votre histoire.

Voici quelques exemples très connus :
– Un adolescent va étudier dans une école étrange.
– Un meurtre à résoudre dans un lieu clos, le coupable est sur place.
– Survivre à une épidémie tout en essayant de créer un remède.
– Un héros bienveillant protège et sauve des innocents des forces du mal.

Comme vous le voyez, le concept englobe souvent une caractéristique de l’univers ou des personnages, ainsi qu’une idée d’action. Mais pour devenir intéressant, il a besoin d’être personnalisé. Donc on aura, si on développe les exemples précédents :
– une école de : sorciers, fées, dieux, assassins…
– un meurtre dans : un train, un paquebot, un petit village, un vaisseau spatial…
– une épidémie qui transforme en : zombie, monstre, ou qui rend amnésique…
– un héros bienveillant : une magicienne, un médecin, un extraterrestre, une enquêtrice…

Autre exemple, différent et personnel (pour la mise en situation) : quand j’ai eu l’idée de ma série Flingues et tentacules, j’ai repris le concept classique du « duo d’enquêteurs qui apprennent à travailler ensemble pour résoudre un problème ». Et rien que sur ce concept, il y a de nombreuses possibilités de personnalisation :

– un duo d’enquêteurs : frère et sœur, policier et avocat, détective et démon,  retraité et jeune recrue, médecin et malade…

Les exemples listés ci-dessus sont très basiques, mais votre réponse à vous ne le sera pas forcément ! Par exemple, j’ai revisité le “duo d’enquêteurs” avec une chasseuse et un monstre… dont les corps ont fusionné accidentellement. J’ai bien mes deux enquêteurs, et ils ont une particularité très spéciale. Ainsi, toute l’histoire repose sur le traitement de ce concept.

Alors, quel est votre concept général, et quelles sont ses caractéristiques originales ou ses particularités ? Si vous parvenez à le trouver, il ressortira nécessairement dans votre pitch et le rendra beaucoup plus clair… et surtout plus intéressant !

La formulation du pitch de roman

« C’est le lien le plus simple entre le personnage et l’intrigue, qui est généralement constitué d’un événement déclenchant l’action, d’une indication sur le personnage principal et d’une indication sur le dénouement de l’histoire. » L’Anatomie du Scénario, John Truby

« Dans telle arène, à la suite de tel accident déclencheur, tel personnage se bat contre tels obstacles pour atteindre tel objectif. » Yves Lavandier

Voici les conseils de deux maîtres en la matière, qui nous permettent d’y voir plus clair. Et vous voyez, la liste qu’on a dressée ci-dessus va servir à concevoir votre pitch !

Au niveau de la taille, on peut avoir des pitchs plus ou moins gros. Cela va d’une seule phrase à une dizaine de lignes. N’hésitez pas à vous construire plusieurs versions de pitchs, car les éditeurs n’ont pas tous les mêmes exigences lorsqu’ils en demandent. Cela dit, le pitch en une seule phrase (ou parfois une seule ligne) est le plus difficile à concevoir. Mieux vaut partir sur une moyenne de 5-6 lignes ou 500 caractères (espaces comprises) pour commencer.

Donc on va débuter par les personnages ou l’univers, généralement ils se suivent de près, puis mentionner l’incident déclencheur ou le problème à résoudre, puis la menace qui plane et l’enjeu de l’histoire. Pour rendre le pitch intéressant, il faut vraiment qu’on ait un aperçu de l’histoire, de quoi elle va parler, et notamment  suggérer les conflits, les obstacles, les difficultés des personnages.

Par exemple :

« Un adolescent orphelin (personnage  + particularité), découvre qu’il est un sorcier (incident déclencheur). Il intègre une école de magie (contexte + concept), afin de se préparer à affronter le mage noir (objectif + menace) qui menace l’école et ses amis (enjeu). »

Ça, c’est le tome 1 d’Harry Potter, mais si l’on prenait l’histoire dans son ensemble, on pourrait mentionner le lien qui existe entre Harry et Voldemort, et se concentrer sur la prophétie. À cette échelle, on pourrait même avancer que le concept de la série repose plutôt sur le lien entre ces deux personnages, car c’est l’élément qui donne une saveur différente au conflit basique « un héros sauve ses amis et le monde d’un méchant sorcier ». Mais lorsque le tome 1 est sorti, la notion d’école de magie était encore assez rare dans les romans et suffisait comme concept original à part entière.

Autre exemple :

« Un marine paraplégique (personnage + particularité) est envoyé en mission (incident déclencheur) sur la planète Pandora (contexte) pour protéger une exploitation minière (objectif antagoniste). En se mêlant aux autochtones grâce à un clone génétique qu’il pilote (concept), il noue toutefois des amitiés et souhaite les aider à libérer leur monde (objectif) de l’armée terrienne et des groupes industriels (antagonistes). »

Vous aurez reconnu Avatar ! On remarque, dans cette histoire, que le personnage principal est d’abord lié à l’objectif de l’antagoniste, avant de se forger son propre objectif personnel.
À noter que le concept pourrait être retiré sans changer le sens de l’histoire, mais qu’il a le pouvoir de rendre le pitch plus intéressant. Ici, le concept se situe sur le « comment », sur le moyen utilisé par le personnage pour réaliser ses actions et son objectif.

Et en bonus, voici l’un des pitchs de Monstrueuse, le tome 1 de ma série Flingues et tentacules :

Depuis l’ouverture de failles interdimensionnelles, des monstres rôdent sur Terre (contexte). Une chasseuse asociale et un monstre tentaculaire (personnages + particularités) voient accidentellement leurs corps fusionner (élément déclencheur + concept). Tenter d’inverser le processus (objectif) les entraîne dans un apprivoisement mutuel difficile (concept), complexifie les enquêtes (menace) et les transforme en menace (menace) pour les autres chasseurs (antagonistes).

Vous remarquerez que j’ai fait l’impasse sur l’enjeu, parce qu’on peut se douter que les personnages souhaitent survivre et retrouver leur liberté.

Le cas du pitch trajectoriel

Suggéré par Yves Lavandier, le pitch trajectoriel se concentre sur les personnages, leur situation initiale et leur évolution. Comme son nom l’indique, il expose la trajectoire des personnages principaux :
 « Face à tel conflit, tel personnage avec tel trait de caractère apprend à acquérir le trait de caractérisation inverse ». Yves Lavandier

L’aspect trajectoriel peut éventuellement venir compléter un pitch classique, et l’information sur l’évolution du ou des personnages sera donc plutôt placée dans la deuxième moitié du pitch, soit avant soit après la menace, l’antagoniste ou l’enjeu.


Eh bien, maintenant que vous avez toutes les clés en main, j’espère que vous parviendrez à nous écrire un super pitch ! Entraînez-vous autant de fois qu’il le faudra, ça finira par devenir plus facile ! Et n’hésitez pas à poster votre pitch en commentaire !

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mip
mip
2 années il y a

Merci pour cet article encourageant, il n’y a rien de plus difficile que de parler de son roman, et ta manière d’amener à le faire paraît ludique, en effet 🙂